Les aoutiens du droit routier – épisode 4 : Focus sur les EDPM (Engins de Déplacement Personnel Motorisés)

Ces « engins » regroupent les trottinettes électriques, gyropodes, monoroues et autres hoverboards.

Il s’agit d’une catégorie de véhicules prévue par le Code de la route (point 6.15 de l’article R. 311-1) et définie comme : « un véhicule sans place assise, conçu et construit pour le déplacement d’une seule personne et dépourvu de tout aménagement destiné au transport de marchandises, équipé d’un moteur non thermique ou d’une assistance non thermique et dont la vitesse maximale par construction est supérieure à 6 km/h et ne dépasse pas 25 km/h »

Ces EDPM sont donc soumis à des règles de circulation et d’équipement spécifiques:

  • Il est interdit de conduire sous imprégnation alcoolique, après usage de stupéfiants.
  • L’usage d’oreillettes, d’un casque ou de tout appareil susceptible d’émettre un son est interdit ; comme l’usage du téléphone tenu en main.
  • L’âge minimal pour conduire un EDPM est de 12 ans.
  • L’EDPM doit être équipé de feux de position avant et arrière, d’un système de freinage et d’un avertisseur sonore.
  • Le conducteur doit porter de nuit un vêtement rétroréfléchissant.
  • L’EDPM ne peut pas circuler sur le trottoir. Il peut néanmoins y être stationné sans gêner les piétons.
  • En ville, en principe l’EDPM doit circuler sur la piste cyclable. A défaut sur la route.
  • Hors agglomération, la circulation des EDPM doit se faire en principe sur les pistes cyclables ou sur les voies vertes (réservées aux déplacements non motorisés). A défaut sur les routes où la vitesse maximale est égale ou inférieure à 80 km/h.
  • Le propriétaire de l’EDPM doit souscrire une assurance spécifique.

Toute infraction aux règles précitées, si elle ne peut entraîner aucune perte de points sur le permis de conduire, est punie de 35 à 135 € d’amende ; voire 1.500 € en cas de circulation avec un EDPM dont la vitesse maximale est supérieure à 25 km/h, avec risque de confiscation.

Les aoutiens du droit routier – épisode 3 : Focus sur l’apparence du conducteur

Le conducteur peut-il être verbalisé s’il conduit torse nu ou en tongs ou s’il écoute de la musique dans un casque ?

Voici quelques questions, non limitatives, dont la réponse apparaît certes incertaine, mais unique et prévue à l’article R. 412-6 du Code de la route :

« Tout conducteur doit se tenir constamment en état et en position d’exécuter commodément et sans délai toutes les manœuvres qui lui incombent. Ses possibilités de mouvement et son champ de vision ne doivent pas être réduits par le nombre ou la position des passagers, par les objets transportés ou par l’apposition d’objets non transparents sur les vitres ».

  • Puis-je conduire torse nu, en tongs ou avec des talons de 20 cm ?

Encore une réponse de Normand.

Car cela relève de l’appréciation des forces de l’ordre, voire, le cas échéant, d’un juge.

Ils pourraient estimer que vous ne vous trouvez pas dans les conditions idéales pour conduire et effectuer les manœuvres de votre véhicule et donc que « ces équipements » pourraient entrainer une perte de contrôle, voire un accident.

Donc, si a priori il n’y a pas d’interdiction puisque la notion « d’être constamment en état et en position d’exécuter commodément et sans délai toutes les manœuvres » est subjective, il s’agit néanmoins d’une infraction courante punie d’une amende forfaitaire de deuxième classe, 35 € (sans perte de points), avec possibilité que le véhicule soit frappé d’immobilisation.

Compte tenu du caractère subjectif de cette notion, il est possible de contester la verbalisation. En pratique cela reste très rare du fait du montant de l’amende forfaitaire.

  • Puis-je écouter de la musique à fond ou au casque ?

Là encore il faut se référer à l’article précité et à son appréciation subjective.

Outre la notion de tapage, si les forces de l’ordre considèrent que le volume sonore vous empêche de conduire et d’entendre correctement (le deux tons par exemple), vous pouvez être verbalisé d’une amende forfaitaire de 35 €.

S’agissant du port casque, qu’il diffuse ou non du son, cela est interdit et la sanction, qui est la même que si vous tenez en main votre téléphone, est lourde : la perte de 3 points et à titre de peine principale une amende pouvant aller jusqu’à 750 € (généralement une amende forfaitaire de 135 €). Le contrevenant risque également à titre de peine complémentaire une suspension de son permis de conduire.

Les aoutiens du droit routier – épisode 2 : Transporter les enfants de ses voisins pour rentrer du centre aéré, quels risques ?

En période estivale et en l’absence de ramassage scolaire, voici une pratique particulièrement répandue. Mais quels sont les bons réflexes à adopter ?

  • Qui peut monter à l’avant de la voiture ?

Un enfant âgé de 10 ans ou plus.

Sauf (outre le siège bébé dos à la route) si le véhicule ne dispose pas de banquette arrière ou de ceinture de sécurité arrière, ce qui sera le cas si l’enfant voyage dans un véhicule utilitaire, ou si tous les autres sièges sont occupés par d’autres enfants de moins de 10 ans.

Dans le cas contraire, il vous en coutera (en général) une amende forfaitaire de 135 €.

  • Qui est responsable en cas de PV ?

Bien que les enfants soient sous la garde de leurs parents, c’est bien évidemment l’adulte qui conduit qui est responsable. Ainsi, en cas de non port de la ceinture de sécurité par exemple, il devra payer 135 € pour chaque enfant non attaché.

  • Quel équipement pour les transporter ?

En principe un réhausseur ou système homologué de retenue pour enfant.

Mais tout dépend en réalité de la morphologie de l’enfant. Si celle-ci est adaptée au port de la ceinture de sécurité, le réhausseur n’est pas obligatoire même si l’enfant a moins de 10 ans.

Ou alors, votre enfant dispose d’un certificat médical d’exemption délivré par un médecin agréé par la préfecture.

Ou alors votre enfant voyage dans un taxi ou un transport en commun.

  • Puis-je fumer en présence d’enfants dans la voiture ?

NON. Le Code de la santé publique est clair : « Il est interdit à tous les occupants d’un véhicule de fumer en présence d’un enfant de moins de dix-huit ans ».

Tout contrevenant risque une amende pouvant aller jusqu’à 750 € (généralement ce sera une amende forfaitaire de 135 €).

  • Dois-je prévenir mon assureur ?

Non, sauf s’il s’agit d’un véhicule de fonction. Dans ce cas et afin d’éviter tout problème, il convient de prévenir son employeur.

Les aoûtiens du droit…épisode 20

– Comment, en qualité de victime personne physique, récupérer les dommages et intérêts qui vous sont alloués par le juge pénal ? –

Si l’auteur de l’infraction est insolvable, il est possible de déposer une demande d’indemnisation auprès de la Commission d’indemnisation des victimes d’infraction (CIVI).

1. Quelles infractions ?

o Atteintes graves à la personne : ITT supérieure à un mois, mort d’un proche, viol, agression sexuelle, atteinte sexuelle sur mineur. L’indemnisation par la CIVI dans ce cas n’est pas plafonnée et n’est pas subordonnée à une condition de ressources.

o Atteinte légère à la personne. 3 conditions cumulatives: ITT inférieure à un mois et l’infraction doit avoir entraîné des troubles graves dans votre vie et aucun autre organisme ne peut vous indemniser.Le montant de l’indemnisation est alors plafonné à 4.693 € et vos ressources ne doivent pas dépasser un certain plafond (ex : 2.128 euros avec 2 personnes à charges).

o Dommage matériel : vol, escroquerie, dégradation…Vous pouvez obtenir une indemnisation qui est la même et qui reprend les mêmes conditions que pour l’atteinte légère à la personne.

2. Comment saisir la CIVI ?

Il faut déposer une requête. Il est important de se faire assister par un avocat.

3. Dans quel délai saisir la CIVI ?

3 ans à partir de la date de l’infraction s’il n’y a pas (encore) eu de procès.S’il y a eu procès, 1 an à compter de la dernière décision devenue définitive rendue par la juridiction pénale.

Si vous ne remplissez pas les conditions pour que la CIVI soit saisie, si vous avez subi un préjudice n’entraînant qu’une ITT de moins d’un mois par exemple, il est possible de déposer une demande d’aide au recouvrement devant un autre organisme : le SARVI. Si le montant des dommages et intérêts qui vous sont alloués par le juge est inférieur ou égal à 1.000 euros, le SARVI vous versera 100 % de la somme qui vous est due. Si le montant est supérieur à 1.000 euros, le SARVI vous versera 30 % de la somme due, avec un montant minimal de 1.000 euros et un maximum de 3.000 euros. Ensuite, le SARVI se chargera de recouvrer, auprès du condamné, le reste dû et, le cas échéant, vous serez indemnisé au fur et à mesure.

Là encore il est important de prendre attache avec un avocat.

Les aoûtiens du droit…épisode 14

– Définition de quelques termes juridiques –

Assignation : acte souvent rédigé par un avocat et délivré par Huissier de justice qui indique à votre adversaire votre volonté d’entamer une procédure judiciaire.

Astreinte : condamnation au terme de laquelle une personne doit payer une somme d’argent par jour de retard si elle ne remplit pas l’obligation pour laquelle elle a été condamnée.

Cédant : celui qui vend, qui cède un actif.

Cessionnaire : celui qui achète, qui reçoit un actif.

Compétence : aptitude d’un tribunal a pouvoir juger une affaire. Elle se décline en compétence matérielle et territoriale.

Créancier : celui à qui l’on doit quelque chose.

Débiteur : celui qui doit quelque chose

Défendeur : personne contre qui le procès est intenté.

Délibéré : temps que le juge s’accorde après la clôture des débats pour réfléchir et rendre sa décision qu’on appelle jugement.

Demandeur : personne qui est à l’initiative d’un procès.

Jurisprudence : ensemble des décisions de justice.

Mise en examen : décision du juge d’instruction (ou du juge des enfants s’il s’agit d’un mineur) au terme de laquelle il décide de poursuivre la personne contre laquelle il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice à l’infraction dont il est saisi.

Moratoire : délai pendant lequel les poursuites sont suspendues.

Prescription : délai au-delà duquel vous ne pouvez plus agir contre une personne en justice.

Procédure collective : désigne grossièrement les procédures anticipatrices (mandat ad hoc, conciliation, sauvegarde ) et de traitement (redressement et liquidation judiciaire) des difficultés des entreprises.

Référé : procédure judiciaire rapide qui permet en cas d’urgence de demander une mesure d’expertise ou l’exécution d’une obligation qui n’est pas contestable (provision ou obligation de faire).

Sûretés: technique permettant de s’assurer du règlement de sa créance par le débiteur s’il ne dispose pas de liquidités ou de biens dont le valeur suffirait à désintéresser les créanciers. On distingue les sûretés réelles mobilières (nantissement, gage) immobilières (hypothèque, antichrèse) des sûretés personnelles (cautionnement par exemple).

Sursis : suspension de l’exécution d’une peine pendant un certain temps. Exemple : condamnation à 1 an de prison avec sursis pour avoir commis un délit, cela signifie que si pendant les 5 années qui suivent la condamnation la personne ne commet pas un nouveau délit, la peine de prison tombe. Par contre s’il commet un délit la personne ira 1 an en prison. Si, pendant ce laps de temps la personne commet à nouveau la même infraction elle est alors en état de récidive.

Témoin assisté : à la différence du mis en examen, il n’y a ici que des indices laissant penser qu’il aurait pu commettre l’infraction.

Enfin, on dit « une loi ou un article dispose » et « un contrat stipule » 

Les aoûtiens du droit…épisode 11

– Il est interdit, par principe, de brûler des déchets verts dans son jardin –

Une circulaire du 18 novembre 2011 rappelle que le brûlage des déchets verts peut être à l’origine de troubles de voisinages générés par les odeurs et la fumée, qu’il nuit à l’environnement et à la santé et qu’il peut être la cause de la propagation d’incendie.

Il est donc interdit de brûler des déchets verts dans son jardin.

Qu’entend-on par déchets verts ?

Des éléments issus de la tonte de pelouses, de la taille de haies et d’arbustes, d’élagages, de débroussaillement, etc.

Toutefois, des dérogations, préfectorale voire municipale, peuvent exister si vous habitez dans une commune dépourvue de déchetterie.

Que faire si vous êtes incommodés ?

Soit faire appel aux services de la mairie ou de police. La personne qui brûle ses déchets verts à l’air libre dans son jardin encourt une amende de 450 euros.

Soit faire constater le trouble par Huissier de justice et engager la responsabilité de votre voisin pour trouble anormal du voisinage et particulièrement nuisances olfactives.

Cette interdiction vaut également pour les paysagistes et autres entreprises d’élagages.

Les aoûtiens du droit…épisode 10

– Vous êtes victime d’une infraction, que faire? –

La première chose est de déposer plainte.

Après enquête, si le Procureur de la république considère qu’il y a assez d’éléments pour renvoyer l’affaire devant le tribunal vous serez convoqué à une audience. Vous pourrez alors vous constituer partie civile et solliciter des dommages et intérêts.

La plainte peut être déposée :

– Soit en vous déplaçant au commissariat de police ou en gendarmerie
– Soit directement entre les mains du Procureur de la république par LRAR

Il est aussi possible, si vous ne connaissez pas l’auteur des faits, d’effectuer une pré-plainte en ligne, mais uniquement pour des infractions aux biens (vol par exemple) ou des faits discriminatoires.

Si le Procureur de la république considère qu’il n’y a pas assez d’éléments et classe votre plainte sans suite, vous pouvez le « forcer » à poursuivre par le dépôt d’une plainte avec constitution de partie civile.

Enfin, pour les contraventions et les délits, il est possible de saisir directement, sans qu’il y ait enquête, la juridiction pénale (tribunal de police ou tribunal correctionnel) uniquement si vous possédez des preuves suffisantes. C’est la citation directe.

La procédure pénale obéissant à des principes stricts, il est vivement conseillé de faire appel à un avocat.

Rapide aperçu des dispositions de la loi du du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19

  • Dispositions pénales :
    • 135 euros d’amende en cas de violation des obligations décrétées par le premier ministre, telles les mesures limitant la liberté d’aller et venir, la liberté d’entreprendre et la liberté de réunion dont l’interdiction du déplacement de toute personne hors de son domicile dans les lieux et aux heures fixés par décret. Pour garantir la santé publique, il peut également interdire aux personnes de sortir de leur domicile, sous réserve des déplacements justifiés par des besoins familiaux, professionnels ou de santé impérieux.
    • 1500 euros d’amende en cas de violation constatée à nouveau dans un délai de 15 jours.
    • 6 mois d’emprisonnement et 3750 euros d’amende, peine à laquelle peut s’ajouter une peine complémentaire de TIG et de suspension pour 3 ans au plus du permis de conduire.
    • Les agents de police municipale et les gardes champêtres, pour ce qui nous concerne, peuvent constater par procès-verbal les contraventions de violation des mesures prises dans le cadre de la crise sanitaire liée au covid-19
Le Gouvernement sera autorisé à prendre par ordonnance dans un délai de 3 mois toute mesure pouvant entrer en vigueur au 12 mars 2020 (mesure rétroactive). Ces mesures concerneront:
  • Dispositions en matière de droit du travail:
    • Renforcement de l’activité partielle pour « toutes les entreprises » (BTP compris) et quelque soit leur taille. De nouvelles catégories de bénéficiaires pourraient voir le jour et sera réduit le « reste à charge » pour les employeurs et, pour les indépendants, la perte de revenus.
    • CP et RTT: Les entreprises vont pouvoir, par accord d’entreprise ou de branche (donc pas de décision unilatérale), imposer à leur salariés de prendre leurs congés payés ou de modifier leurs dates, dans la limite de 6 jours ouvrables. Pour les RTT par contre, un accord collectif n’est pas nécessaire puisque l’employeur peut, unilatéralement, imposer ou modifier unilatéralement les dates des jours de RTT, des jours de repos prévus par les conventions de forfait et des jours de repos affectés sur le CET du salarié.
    • Dérogation à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical pour les entreprises « de secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation ou à la continuité de la vie économique« . La liste sera publiée plus tard, il s’agira sans doute des entreprises du secteur agro-alimentaire, de l’énergie, des services supports et logistiques des établissements de santé.
    • Assouplissement des conditions et des modalités de versement de la prime exceptionnelle de pouvoir d’achat.
    • Assouplissement des conditions (date) et modalités de versement des sommes dues au titre de l’intéressement et de la participation.
    • Assouplissement des modalités d’information et de consultation du CSE « pour leur permettre d’émettre les avis dans les délais requis » en facilitant le recours aux consultations dématérialisées. Egalement suspension des processus électoraux des CSE en cours.
  • Dispositions en matière de droit commercial:
    • Adaptation des dispositions du Livre 6 (qui concerne les entreprises en difficulté) « afin de prendre en compte les conséquences de la crise sanitaire« : création d’un fonds de solidarité avec la participation des régions pour les petites entreprises, extension du champ du chômage partiel, capacité renforcée de la Banque publique d’investissement d’accorder des garanties, report des charges sociales et fiscales et sursis aux factures de loyers, de gaz et d’électricité pour les petites entreprises et les petits commerces… Dans ce contexte, il est demandé au Président des Tribunaux de commerce de ne pas ouvrir de nouvelles procédures.
  • En matière procédurale, une ordonnance sera prise adaptant, interrompant, suspendant ou reportant le terme des délais prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, déchéance d’un droit (à l’exception des mesures privatives de liberté et des sanctions). Ces mesures seront rétroactivement applicables au 12 mars 2020.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000041746313&categorieLien=id

Le Droit pénal est d’interprétation stricte. Le Tribunal correctionnel de BOULOGNE SUR MER l’a rappelé dans un jugement du 3 juillet 2019 à propos de l’agression d’une fillette par le chien d’une assistante maternelle.

Madame X, assistante maternelle, était poursuivie devant le Tribunal correctionnel pour une infraction non-intentionnelle: elle avait laissé quelques instants la fillette, qui était sous sa garde, avec son chien; chien qui l’avait mordu au visage lui causant une ITT inférieure à 3 mois.

Madame X ayant contribué à la situation qui a amené le dommage (causalité indirecte) une faute dite qualifiée devait être prouvée.

Nous avons démontré que tel n’était pas le cas. Elle a été relaxée.

Le principe de légalité, auquel est soumis le droit pénal, implique que l’on ne peut être condamné pénalement qu’en vertu d’un texte clair et précis.


Or, l’infraction pour laquelle était poursuivie Madame X, suppose d’une part un élément matériel, à savoir une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement. Or, le chien était un border collie, il n’appartenait pas à la classe des chiens dangereux ; il n’avait pas besoin d’être tenu en laisse à l’intérieur de la maison ; Madame X n’était pas en état d’ivresse et bien qu’assistante maternelle, rien ne lui interdit de posséder un animal de compagnie (la PMI savait qu’elle possédait un chien et son agrément ne lui a pas été retiré depuis). D’autre part, un élément intellectuel, à savoir la volonté manifestement délibérée de violer cette obligation. Ce qui n’était bien évidemment pas le cas.


Ainsi, l’infraction n’étant pas caractérisée, le Tribunal correctionnel a renvoyé Madame X des fins de la poursuite et l’a relaxée pour ces faits le 23 juillet 2019.

https://www.lavoixdunord.fr/606305/article/2019-06-29/le-chien-d-une-nounou-de-boulogne-avait-mordu-une-fillette-au-visage#&VP=0&VP=0&VP=0

Crowdfunding et prise en charge des condamnations judiciaires

Peut-on utiliser une cagnotte en ligne pour financer les conséquences d’une infraction ? 

N’importe quel individu répondrait « non », instinctivement. 

Effectivement.

Mais sur quel fondement juridique ? 

Vous avez certainement entendu parler, aux journaux télévisés ou à la radio de l’article 40 de la loi de 1881 sur la liberté de la presse. Il se situe au sein du paragraphe 5 « Publications interdites, immunités de la défense » et dispose : 

« Il est interdit d’ouvrir ou d’annoncer publiquement des souscriptions ayant pour objet d’indemniser des amendes, frais et dommages-intérêts prononcés par des condamnations judiciaires, des amendes forfaitaires, des amendes de composition pénale ou des sommes dues au titre des transactions prévues par le code de procédure pénale (…) sous peine de six mois d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende, ou de l’une de ces deux peines seulement (…) ».

Donc si l’annonce de la cagnotte possède un tel objet, elle est constitutive d’une infraction pénale. 

Quid de la cagnotte mise en place au « soutien à Christophe D, le « boxeur Gilet Jaune » » ?

Selon l’annonce, son objet est de  « soutenir sa famille et lui montrer la solidarité du peuple des Gilets Jaunes, du vrai peuple français ».

Certes, il n’y a aucune annonce publique, expresse, d’une future indemnisation susceptible d’être due en cas de reconnaissance de culpabilité au sens de l’article 40.  

Mais, on ne peut douter qu’une telle cagnotte entre dans le cadre de ce texte. 

En effet, que comprendre par ce terme « soutenir » ? Si ce n’est un soutien financier pour prendre en charge les futurs honoraires du conseil de Monsieur DETTINGER (qui n’est pas visé par ces interdictions) et les éventuelles condamnations civiles susceptibles d’être allouées aux parties civiles si sa culpabilité est déclarée.

C’est d’ailleurs le sens que leur donne la plupart des commentaires des donateurs :  » Aider sa famille à vivre durant la détention «  ; « ce don a pour but sa défense pour se payer un bon avocat et pour aider sa famille durant le temps de son incarcération «  ;  » Christophe va en avoir grand besoin pour sa défense  » ;  » Ma participation pour lui payer les frais d’avocat, ses frais de justice et son salaire perdu  » ; « Que cela puisse vous aider à vous défendre… » etc. 

Et, si l’on reprend le discours du General Manager de LEETCHI, Benjamin BIANCHET, interrogé sur le déblocage de la cagnotte :

« Pour débloquer les fonds, il faudra que l’organisateur nous fournisse un devis, une facture ou des factures, en fonction des frais de justice et, à ce moment-là, on fera le versement directement sur le compte de l’avocat »

https://www.tf1.fr/tmc/quotidien-avec-yann-barthes/videos/gilets-jaunes-boxeur-de-gendarmes-christophe-dettinger-pourra-t-utiliser-cagnotte.html

Il ne semble plus y avoir de doute, du moins si les honoraires de son conseil ne s’élève pas à cette somme…

  • Attention toutefois, il est préférable pour l’avocat de percevoir directement les honoraires de son client (l’avocat doit refuser le paiement de ses honoraires par un tiers). C’est donc au client de percevoir les sommes recueillies ; qui constituent pour lui un don au plan fiscal. 

Donc, on peut créer une cagnotte en ligne pour financer les honoraires (prévisibles) d’un avocat mais pas pour régler des éventuels dommages et intérêts. La déontologie de l’avocat devrait garantir le respect de cette interdiction. 

Que disent les CGU du site LEETCHI ?

Si l’on reprend les CGU du site LEETCHI et particulièrement l’article 26.1 selon lequel :  » Vous ne pouvez pas utiliser le Site pour des activités qui: (…) sont liées à des transactions impliquant (…) f) la promotion de la haine, violence (…)  » ; il est patent que de très nombreuses transactions promeuvent ou à tout le moins attisent des discours haineux voire violents. 

En effet, là encore si l’on reprend certains commentaires:

  1. Que ce soit en faveur de la cagnotte : « Pour la dignité des bouseux de la gueule!« ; « Ces poings d’or qui nous montrent le chemin… » ; « Je fais un don car ce n’était que de légitime attaque (…) » ; « il ne faut rien lâcher; nous sommes en 1787; il a fallu 2 ans avant que tout s’effondre; ça prendra le temps que ça prendra; mais on dansera encore la carmagnole » ; « Tous les mouvements insurrectionnels ce sont accompagnés de violences et hélas, en France, tous les progrès sociaux ce sont faits dans la violence » ; « enfin quelqu’un qui ose réellement leurs casser la gueule, bravo » ; « Tu as eu raison on devrais tous faire pareil » ; « merci de votre action contre les mercenaires des collabos du 4e Reich… » ; « Ils veulent en faire un exemple, ils en feront un martyr » ; « Love your friends, hate the police. Force aux GJ » ; « Gloire à Christophe. Gloire à la France. À bas la République ! Gilets Jaunes unis !« , etc.
  2. Ou contre celle-ci : « Je participe de 0.10€ en espérant que ce pauvre type se prenne la peine maximale prévue par le code pénal » ; « Je te donne 0,1€ espèce d’ordure décérébrée. Je te laisse vivre avec le fric que ces méchants riches qui payent pour toi« , etc.

Un certain nombre de transactions constituent, au sens de l’article 26.1, des « activités interdites »

Finalement, ce qui est intéressant par ce procédé, c’est autant l’étude de cet aspect du Crowdfunding, que ce qu’il révèle : de nouvelles pistes de réflexion sur la présomption de culpabilité 2.0 ou sur la prévisibilité de la peine.