Les aoûtiens du droit…épisode 14

– Définition de quelques termes juridiques –

Assignation : acte souvent rédigé par un avocat et délivré par Huissier de justice qui indique à votre adversaire votre volonté d’entamer une procédure judiciaire.

Astreinte : condamnation au terme de laquelle une personne doit payer une somme d’argent par jour de retard si elle ne remplit pas l’obligation pour laquelle elle a été condamnée.

Cédant : celui qui vend, qui cède un actif.

Cessionnaire : celui qui achète, qui reçoit un actif.

Compétence : aptitude d’un tribunal a pouvoir juger une affaire. Elle se décline en compétence matérielle et territoriale.

Créancier : celui à qui l’on doit quelque chose.

Débiteur : celui qui doit quelque chose

Défendeur : personne contre qui le procès est intenté.

Délibéré : temps que le juge s’accorde après la clôture des débats pour réfléchir et rendre sa décision qu’on appelle jugement.

Demandeur : personne qui est à l’initiative d’un procès.

Jurisprudence : ensemble des décisions de justice.

Mise en examen : décision du juge d’instruction (ou du juge des enfants s’il s’agit d’un mineur) au terme de laquelle il décide de poursuivre la personne contre laquelle il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice à l’infraction dont il est saisi.

Moratoire : délai pendant lequel les poursuites sont suspendues.

Prescription : délai au-delà duquel vous ne pouvez plus agir contre une personne en justice.

Procédure collective : désigne grossièrement les procédures anticipatrices (mandat ad hoc, conciliation, sauvegarde ) et de traitement (redressement et liquidation judiciaire) des difficultés des entreprises.

Référé : procédure judiciaire rapide qui permet en cas d’urgence de demander une mesure d’expertise ou l’exécution d’une obligation qui n’est pas contestable (provision ou obligation de faire).

Sûretés: technique permettant de s’assurer du règlement de sa créance par le débiteur s’il ne dispose pas de liquidités ou de biens dont le valeur suffirait à désintéresser les créanciers. On distingue les sûretés réelles mobilières (nantissement, gage) immobilières (hypothèque, antichrèse) des sûretés personnelles (cautionnement par exemple).

Sursis : suspension de l’exécution d’une peine pendant un certain temps. Exemple : condamnation à 1 an de prison avec sursis pour avoir commis un délit, cela signifie que si pendant les 5 années qui suivent la condamnation la personne ne commet pas un nouveau délit, la peine de prison tombe. Par contre s’il commet un délit la personne ira 1 an en prison. Si, pendant ce laps de temps la personne commet à nouveau la même infraction elle est alors en état de récidive.

Témoin assisté : à la différence du mis en examen, il n’y a ici que des indices laissant penser qu’il aurait pu commettre l’infraction.

Enfin, on dit « une loi ou un article dispose » et « un contrat stipule » 

Les aoûtiens du droit…épisode 8

– Mon voisin fait trop de bruit, que faire ? –

  • Quels types de bruits ?

D’abord, si les bruits nocturnes sont sanctionnables, les bruits en journée le sont également.

Sachez ensuite que ce n’est pas le nombre de décibels qui crée le trouble. Ce qui importe de démontrer est le caractère anormal de la nuisance. Ainsi, ont été sanctionnés le fait pour une personne de marcher en talon dans l’appartement du dessus ou encore le fait pour un musicien de s’entrainer toute la journée.
Donc des bruits modérés mais exaspérants dans la durée peuvent être sanctionnés.

  • Quelles sanctions ?

Pénales : les bruits ou tapages injurieux ou nocturnes troublant la tranquillité d’autrui sont punis d’une amende de 450 euros maximum.

Si votre voisin est locataire, il faut en aviser le propriétaire. Ce dernier doit mettre en demeure son locataire de faire cesser les troubles. S’il ne les cesse pas, il peut enclencher la procédure de résiliation de bail. Par contre, si le bailleur ne réagit pas, il peut engager sa propre responsabilité.

Civiles : il faut apporter la preuve d’un trouble anormal du voisinage. Celle-ci peut l’être par une procédure d’urgence au terme de laquelle le Tribunal nomme un expert acousticien afin de mesurer le bruit.

Droit de propriété vs squatteur : 1-0

Un propriétaire, dont l’immeuble est « squatté », saisit le juge des référés, juge de l’urgence, sur le fondement de l’article 809, alinéa 1er, du Code de procédure civile, afin d’obtenir l’expulsion des occupants sans droit ni titre.

Ces derniers invoquent l’article 8 de la CESDH (droit au respect de son domicile) ainsi que le droit de disposer d’un logement décent.

La Cour de cassation ne suivra pas cet argument.

Cette dernière considère en effet que le caractère absolu du droit de propriété, visé à l’article 544 du Code civil (non modifié depuis 1804!), implique, en cas d’ingérence par un occupant sans droit ni titre, la caractérisation d’un trouble manifestement illicite (condition d’application de l’article 809 susvisé) permettant au propriétaire d’obtenir, par référé, l’expulsion ; et donc de recouvrer la plénitude de son droit.

Cette jurisprudence s’applique tant aux occupants sans droit ni titre de l’intérieur de l’immeuble, que de son terrain.

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000038762757

Compteur LINKY : le Tribunal de grande instance de BOULOGNE SUR MER statuant en référé retient une absence de caractérisation de dommage imminent et de trouble manifestement illicite

Un habitant de LE PORTEL, dans le Pas de Calais, craignant pour sa santé, voulait que soit réinstallé son ancien compteur non communiquant. Il assigna donc ENEDIS en référé sur le fondement de l’article 809, alinéa 1erdu Code de procédure civile.

Par une ordonnance du 30 avril 2019, le juge des référés, s’il a débouté ENEDIS de son exception d’incompétence, a néanmoins rejeté la demande de remise en état.

Il l’a rejetée aux motifs : 

–       D’une part qu’aucune preuve ne permettait de caractériser un dommage imminent de nature à permettre d’ordonner le remplacement du compteur intelligent par un compteur classique. 

–       D’autre part, que la preuve de la violation, par ENEDIS, des prescriptions légales et réglementaires en matière d’enregistrement de la courbe de charge et la transmission des données recueillies n’est pas non plus rapportée, de sorte que le trouble manifestement illicite, qui doit être apprécié au moment où le juge statue, n’est pas, non plus, caractérisé. 

L’absence de caractérisation des ces deux conditions serait la conséquence d’un double défaut de preuve.

Sur l’absence de dommage imminent

Le juge des référés rappelle d’abord que, pour que la mesure de remise en état soit prononcée, il doit être constaté, à la date à laquelle il statue et avec l’évidence inhérente à la juridiction des référés, l’imminence d’un dommage, d’un préjudice ou la méconnaissance d’un droit, sur le point de se réaliser et dont la survenance et la réalité sont certaines.

Or, le demandeur soutenait d’abord qu’aucun délai de prévenance n’avait été respecté par ENEDIS. Si le juge des référés retient qu’effectivement un délai de prévenance suffisant n’a pas été respecté (le demandeur avait reçu le 3 juillet 2018 un courrier du prestataire d’ENEDIS l’informant du changement entre le 28 juin et le 5 juillet 2018 de son compteur ; finalement, le prestataire était intervenu le 29 juin 2018, soit avant la réception du courrier…), ce fait ne justifie pas à lui seul le retrait du compteur LINKY, a fortiori puisqu’il avait été averti, par ENEDIS, 2 mois avant le changement de son compteur.

Ensuite, le demandeur versa aux débats divers certificats médicaux mettant en évidence, certes un certain nombre de troubles : apnée du sommeil, intolérance aux champs électromagnétiques, etc. mais malheureusement établis par son seul médecin traitant. 

Or : 

–       D’une part, le juge considère qu’il ne verse pas la preuve de l’anormalité des taux d’émission de champs magnétiques par le LINKY et, au surplus, que ce dernier se situe à l’extérieur de son logement. 

–       D’autre part, selon le magistrat, le certificat médical repose sur les affirmations du patient, de sorte que le lien de causalité entre ces syndromes et la présence du compteur LYNKY n’est pas certain. 

Enfin, s’appuyant sur les rapports de l’ANSES (Agence Nationale de Sécurité Sanitaire et de l’Alimentation) qui dénient, aujourd’hui, tout lien entre le compteur LINKY et l’apparition de maladies ou d’anomalies biologiques, notamment parce que les ondes émises seraient inférieures aux plafonds prévus par les normes sanitaires, le juge des référés en déduit qu’aucun « élément de preuve ne permet de caractériser un dommage imminent de nature à permettre d’ordonner le remplacement du compteur intelligent par un compteur classique ». 

Sur l’absence de violation des exigences réglementaires en matière de protection des données à caractère personnel

Le compteur LINKY, en vertu des dispositions de l’article R. 341-4 du Code de l’énergie, comporte un traitement des données enregistrées. Les données transmises par le LINKY constituent donc des données personnelles et doivent à ce titre obéir aux dispositions du Règlement Européen du 27 avril 2016.

Or, le demandeur, considérant être victime d’apnée du sommeil et d’intolérance aux champs électromagnétiques s’était, par plusieurs courriers adressés à la Direction de ENEDIS, opposé à la mise en place du LINKY. Ces motifs entraient donc dans le cadre de l’article 21 du RGPD selon lequel : « la personne concernée a le droit de s’opposer à tout moment, pour des raisons tenant à sa situation particulière, à un traitement des données à caractère personnel la concernant (…) ».

Or, force est de constater que les données personnelles continuèrent à être traitées malgré son opposition. De sorte que le demandeur considéra qu’ENEDIS lui causa un trouble illicite et manifeste au sens de l’article 809 précité.

Le juge des référés ne suivra pas cette argumentation. 

S’appuyant sur l’obligation pour ENEDIS d’installer et de déployer ces équipements et sur l’article 6 du RGPD selon lequel le traitement des données est licite s’il est nécessaire à l’exécution d’une mission d’intérêt public, le juge va rejeter la demande en considérant que la preuve n’est pas apportée qu’ENEDIS procéderait à la collecte et à la transmission des données de comptage du demandeur en dehors du cadre légal. 

Par ailleurs, le juge va considérer que la pathologie dont souffre le demandeur ne constitue pas une « situation particulière » au sens de l’article 21 précité, puisqu’ « aucun lien n’est établi entre l’apnée du sommeil dont souffre le demandeur avec la collecte et la transmission des données de comptage, (car) aucune informations à caractère médical n’étant collectées par le compteur LINKY ». 

L’existence d’un trouble manifestement illicite n’est donc pas, non plus, caractérisée.